La numismatique bordelaise

mars/avril 2011

Le but de ces quelques lignes est de présenter les principales caractéristiques de la numismatique bordelaise, concernant les monnaies émises à Bordeaux, mais aussi les jetons et médailles.

LES MONNAIES :

L’histoire commence avec de petites monnaies d’argent de 0,25 à 0,35 g., pour 7 à 8 mm de diamètre, appelées  » fractions d’argent au cheval  » produites par les Bituriges Vivisques au III ou IIe siècle av. J.-C. Ce type de monnaies fut retrouvé en de nombreux endroits bordelais, Grands Hommes, Place de la Comédie, ou Cours du Chapeau Rouge. Il est raisonnable de penser que ces monnaies sont les premières émises à Bordeaux, car elles forment un groupe homogène d’une trentaine d’exemplaires découverts en ces endroits. Nous trouvons à l’avers une tête et au revers un cheval galopant à gauche entre deux annelets (photo n° 1).

À l’époque mérovingienne des tiers de sous d’or portant le nom de Bordeaux,  » BURDIGALA « , furent produits sur place, comme ce rare exemplaire de 1,28 g émis vers 620-640 par le monétaire Bertigiselus (photo n° 2).

Un peu plus tard, à l’époque carolingienne nous retrouvons des deniers d’argent portant encore le nom du Bordeaux antique. À partir du VIIIe siècle l’atelier monétaire se trouva à Saint-Seurin. Il y resta jusqu’au XIIe siècle, puis se déplace sur Saint-Projet durant les XIIIe et XIVe siècles. Nous trouvons là les très belles monnaies anglo-gasconnes au nom d’édouard III ou du Prince Noir. (photo n° 3).

À partir de 1385, sur les monnaies françaises, chaque atelier se vit attribuer un système d’identification, appelé le  » point secret « , permettant d’indiquer sur un endroit précis de la légende l’origine de la monnaie et donc d’éviter toutes fraudes. Seulement, l’atelier de Bordeaux se singularisa en adoptant pour différent(1) un symbole : La nef. Sans doute le choix de ce différent monétaire est-il du à l’activité portuaire de la ville. Plus tard cette nef est posée sur un croissant rappelant ainsi la courbure de la Garonne devant la ville, Bordeaux étant alors le  » Port de la Lune « . À partir du XIVe siècle et jusqu’au XVIIIe siècle, l’atelier monétaire se déplaça au Palais de l’Ombrière de nos jours disparu. Ce ne fut que sous le règne de François Ier, à partir de 1540 que Bordeaux se verra attribuer la lettre K , différent de cet atelier utilisé jusqu’en 1878 et remplaçant la nef sur croissant (photo n° 4). Déjà, dès 1361, les ateliers monétaires anglo-gascons du duché d’Aquitaine, usaient d’une lettre comme différent d’atelier : l’initiale de son nom ; Bordeaux avait ainsi le B. La nef n’est adoptée qu’avec la conquête française de 1453.

À partir du XVIIIe siècle, l’atelier se porte sur Sainte-Croix, où un nouvel Hôtel de la Monnaie venait d’être construit ainsi que la Porte de la Monnaie ; puis un peu après la Révolution, il fut enfin transféré dans le secteur du Palais Gallien jusqu’à sa fermeture, les dernières monnaies portant le différent bordelais datent de 1878. L’Hôtel des Postes lui succéda. La production monétaire est alors centralisée sur la capitale.

Cependant, à partir de 1973, un nouvel établissement moderne fut créé à Pessac , exclusivement réservé à la production de monnaies, l’atelier parisien gardant l’activité relative à la production des médailles. De nos jours toutes les monnaies que nous utilisons quotidiennement proviennent de cet atelier, qui, si cela était possible, mériterait une visite particulièrement intéressante.

Bordeaux est donc une ville au passé monétaire très riche, traversant ainsi les siècles et même les millénaires. Mais il n’est pas inutile de présenter également un autre aspect de la numismatique bordelaise, celui des médailles et jetons.

LES MEDAILLES ET LES JETONS :

Ces documents numismatiques sont assez nombreux et variés, et présentent un réel intérêt, surtout historique, nous permettant d’observer par exemple, la statue équestre de Louis XV jadis érigée sur la Place de la Bourse et disparue lors de la Révolution Française, mais dont nous pouvons encore admirer les bas reliefs en marbre conservés au Musée d’Aquitaine (photos n° 5 & 6).

Un autre exemple pris parmi tant d’autres, nous permet d’imaginer l’animation qui pouvait régner sur les quais, à travers ce très beau jeton de la chambre de commerce émis en I906 (photo n° 7) ; ou bien d’observer la façade de la Banque de Bordeaux, fondée en 1819 (photo n° 8) ; ou encore celle de l’hôpital Saint-André (photo n°9) etc.…

De plus, ces différents jetons présentent assez souvent les armes de la ville, dont nous pouvons apprécier les différentes formes et variantes au cours du temps (photo n° 10).

Dominique URSY

Cercle Bertrand-Andrieu* (Société archéologique de Bordeaux)